Le chaos : phase nécessaire de transformation

· L'Esprit en Eveil

Qui ne connaît pas la métaphore de la chenille et du papillon ? 

Pourtant, on néglige de préciser un point important sur cette métamorphose : dans son cocon, la chenille commence par… se décomposer. 

Si vous observiez ce phénomène sans rien connaître du processus, vous prendriez le cocon pour le sarcophage qu'une curieuse bestiole suicidaire construit pour mourir dedans. Jamais vous n’imagineriez qu’à partir de cette bouillie de chenille décomposée va se former un être ailé, plus évolué qui, au lieu de dévorer les feuilles des arbres, deviendra un merveilleux pollinisateur. 

Aux cellules qui déclenchent cette métamorphose dans le cocon, les scientifiques ont donné le joli nom de « cellules imaginales ». Ce sont elles qui s’opposent à la destruction à l’oeuvre et créent de nouveaux liens entre les composants qui constituaient la chenille avant.

Cet exemple vivant nous enseigne que le changement pour le meilleur peut passer tout d’abord par une nécessaire phase de chaos, de destruction, de décomposition, sans laquelle le nouveau ne pourrait pas se manifester.

Autour de nous, aussi, nous voyons depuis quelques décennies les liens sociaux se rompre sous l’effet de l’individualisme, le tissu social se décomposer. Les confinements successifs ont encore renforcé la division et l’isolement. On observe à l’oeuvre un impressionnant phénomène de fragmentation.

Parallèlement, pourtant, si l’on regarde bien, on voit qu’il y a parmi nous de nombreuses « cellules imaginales », des personnes qui à la moindre occasion recréent du lien sous une multitude de formes nouvelles, des tribus, des ZAD, des oasis d’un genre nouveau, des communautés, des éco-villages, des habitats collectifs, etc. On n’a jamais autant vu le préfixe « co- » : co-voiturage, co-location, co-logement, co-construction, co-gestion, etc. 

Enfermée dans ces multiples cocons que sont les villes, les “bahuts”, les “boîtes” où l’on travaille, mais aussi les écrans omniprésents, sans oublier le cocon d’histoires (qu’il croit vraies) dans lequel s’enferme notre mental, l’humanité vit peut-être l’une de ses plus importantes mutations. 

Pour l’instant, nous en sommes au stade où, face aux forces de désagrégation toujours plus fortes, celles qui oeuvrent à créer de nouveaux liens s’efforcent de gagner elles aussi en puissance et en cohésion, afin de poser les bases d’un monde plus équilibré et plus harmonieux. 

Auquel de ces deux courants souhaitons-nous participer ?

A nous de nous demander, à chaque instant, laquelle de ces deux dynamiques à l’oeuvre – désagrégation ou reconstruction – nourrissent et renforcent tous nos actes quotidiens. Nous pourrons ainsi choisir en conscience d’être de moins en moins complices des forces de division et d’oeuvrer de plus en plus souvent à faire advenir ce monde meilleur qui nous tient à coeur.